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Les déboires d'un bailleur confronté à la crise conjugale de ses locataires

Auteur : SCP FORTUNET & Associés
Publié le : 07/07/2009 07 juillet juil. 07 2009

Un arrêt, rendu le 1er avril 2009 par la Troisème Chambre Civile de la Cour de Cassation, règle une situation assez originale dans des conditions qui méritent la méditation et la prudence des bailleurs d'immeubles.Bail d'habitationI- Voici quelles étaient les circonstances du procès.

Des concubins souscrivent ensemble, en 1996, le bail d'habitation d'un appartement dans lequel ils s'installent.

Ayant tous les deux souscrits, ils sont co-titulaires du bail et leur mariage, célébré quelque temps plus tard, renforce encore cette co-tutularité.

Six ans plus tard, le couple éprouve une crise conjugale dans le cadre de laquelle le mari délaisse le logement avant qu'une ordonnance de non conciliation rendue sur requête en divorce autorise la résidence séparée des époux et attribue provisoirement la jouissance du domicile conjugal à l'épouse.

A quelques temps de là, le propriétaire bailleur de l'immeuble propose à l'épouse occupante un nouveau bail qu'elle souscrit seule.

Mais, rapidement, elle donne congé du bail en annonçant son prochain départ des lieux.

Informé, on ne sait comment, le mari écrit au bailleur pour dire qu'il se tenait comme toujours co- titulaire du bail et n'entendait pas le résilier.

On verra que le bailleur eut tort de traiter par indifférence cette information sinon cette réclamation.

Pourtant, il semble bien qu'en réalité le mari n'avait aucune intention de réintégrer le logement, mais seulement de protéger l'épouse des effets du congé qu'elle avait trop hâtivement donné, sans s'assurer de son relogement.

Beaucoup plus tard, tandis-que le local n'est plus occupé, le mari fait assigner en demandant sa réintégration dans les lieux !

Il fait valoir qu'il n'a jamais cessé d'être et rester co-titulaire du bail et qu'en l'absence de congé, delivré ou recu par lui, le bail s'est reconduit, par tacite reconduction d'abord en 2002, puis en 2005.


II-

a) Par un arrêt rendu le 18 mars 2008, la Cour d'Appel de Paris lui donne raison et satisfaction et ordonne que l'appartement soit mis à sa disposition.

b) Contre cet arrêt le bailleur forme un Pourvoi en Cassation.

A son appui, il fait valoir que le dernier bail a été consenti à la seule épouse, qu'à son terme le mari n'occupait plus effectivement les lieux, en en tirant que la reconduction ou le renouvellement ne pouvait, pour cette raison, lui profiter, qu'en réalité le mari n'avait jamais eu l'intention de réintégrer, mais seulement de protéger l'épouse, et qu'en tout cas, s'il y avait éviction, sa sanction ne pouvait être trouvée que dans l'allocation d'une indemnité de dommages et intérêts et non pas dans une réintégration…sept ans après que les lieux aient été délaissés.

La Cour de Cassation rejette le Pourvoi.

Son Arrêt retient que, faute de congé qui lui ait été délivré, ou de résiliation à son initiative, le mari n'avait cessé de rester co-titulaire du bail, que dans ces conditions le nouveau bail souscrit par l'épouse, sans son consentement, lui était inopposable et enfin que, faute par le bailleur d'avoir justifié d'une indisponibilité matérielle, le locataire devait être rétabli dans la jouissance paisible de l'appartement dont il n'avait cessé d'être locataire.

La solution, qui peut étonner, procède d'une orthodoxie juridique parfaite.

Les effets de la co-titularité d'un bail, qui résultera de sa souscription par plusieurs ou, plus simplement, pour le domicile conjugal, du mariage du locataire ne cède pas facilement.

Les altérations susceptibles d'être apportées à la vie ou la survie du bail ne sont opposables que si elles ont été notifiées à tous ou consenties par chacun des co titulaires.

Et, particulièrement, en matière de divorce, l'attribution provisoire en jouissance, à l'un des époux ne prive pas l'autre, provisoirement évincé, du bénéfice de sa co titularité.

Ce ne serait qu'un jugement définitif de divorce qui attribuerait définitivement le bail à l'ex conjoint qui l'en priverait.



Cet article n'engage que son auteur.

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